3. LES ÉCOULEMENTS
DANS LA CUVETTE AMAZONIENNE.
Le
Rio Amazone et ses affluents se caractérisent comme
nous l'avons vu (cf. 1), non seulement par leur longueur et
la densité du réseau hydrographique, l'immensité
des surfaces drainées, mais surtout par la platitude
de la plaine alluviale dans laquelle s'écoulent des
volumes d'eau considérables. Les auteurs modernes (Guyot,
Molinier, Guimaraes, Cudo de Oliveira et Chaves, 1993 et 1994)
n'hésitent pas à qualifier les débits
de l'Amazone "monstrueux". Plus généralement
au Brésil, on parle du "Rio Mar" (le fleuve
mer). En effet, ces volumes d'eau immenses s'écoulent,
sauf pour l'amont andin avec une pente de 2,1 cm/km pour les
3 700 km (soit plus de la moitié du cours) et
de 1,74 cm/km à partir d'Obidos.
3.1
Des débits impressionnants
3.1.1 Études hydrologiques et méthodes.
L'estimation
des débits moyens du fleuve à son embouchure
varie selon les auteurs (Davis 1964, Nordin et Meade 1985,
Richey & al. 1986) entre 175 000 m3/sec
et 212 000 m3/sec avec un débit spécifique
de 32l/sec/km2, alors que P. Le Cointe (1935) et
M Pardé (1936 et 1954) l'estimaient à environ
100 00 m3/sec. Cette différence est
liée à une méthodologie différente
(vitesse estimée en m/sec multipliée par la
surface de la section du fleuve en m2, les deux
mesures utilisées étant trop sommaire par rapport à
la complexité du fleuve). En effet, à
partir de 1982, un programme de recherche (programme HIBAM)
a permis des campagnes de jaugeage du fleuve dans quelques
stations clefs sur l'Amazone et un certain nombre de ses affluents,
l'établissement de courbe de tarages, et le calcul
par sous-bassin des bilans hydriques et hydrologiques.
Actuellement
350 stations hydrométriques équipent le bassin
dont 220 au Brésil sont gérées par la
DNAEE (Departamento Nacional de Aguas e Energia Electrica).
Par exemple, dans ce programme de recherche hydrologique,
au total 59 stations ont été retenues pour être
jaugées et obtenir des courbes de tarage fiable,
dans les bassins des rivières Purus et Madeira.
Le
Solimões/Amazone et leus affluents, qui se caractérisent
par la faiblesse des valeurs de pente de leur profil longitudinal,
leurs chenaux démesurés, leur profondeur importante
(supérieure à 30 mètres), ont des vitesses
élevées, mais variable en fonction de la forme
et de la profondeur du lit, toujours complexe. une des caractéristiques
de la courbe de débit annuel de nombre de ces cours
d'eau est de constituer une hystérésis.
3.1.2
Débits annuels moyens et débits de crue.
Actuellement,
on estime à 209 000 m3/sec le débit
annuel moyen à son embouchure (amont de l'île de Marajo après
sa confluence avec le Xingu), ce qui suppose un déversement
annuel de 6 600 milliards de m3/an dans l'Atlantique.
Tout au long de son parcours depuis la frontière péruvienne,
le fleuve voit son débit croître. À São
Paulo de Olivença, peu après la frontière
péruvienne, le débit moyen annuel du Solimões/Amazone
est de 46 500 m3/sec, à Manacapuru,
après sa confluence avec le Purus, son débit
moyen annuel atteint 103 000 m3/sec,
et après sa confluence avec le Rio Negro, le débit
de l'Amazone est de 131 600 m3/sec. À
Obidos, après sa confluence le Madeira et autres affluents,
on passe à des valeurs de 168 700 m3/sec.
La
faiblesse des pentes sur tout ce secteur engendre un système
d'écoulement particulier : c'est l'onde de crue en
provenance de l'amont, et notamment du massif andin, qui pousse
les eaux vers l'aval, d'où l'hystérésis
de la courbe des débits au cours de l'année.
Les
débits des plus fortes crues ont été
estimées à Obidos à 290 000 m3/sec
ou 300 000 m3/sec, en juin 1989, avec une
côte de 8 mètres à l'échelle limnimétrique.
Elle est, avec la crue de 1953, la plus forte enregistrée,
à l'échelle historique récente. En extrapolant,
on a pu estimé que le débit maximum instantané
à l'embouchure était, lors de ces évènements
de 360 000 à 380 000 m3/sec.
3.2 Régime et régionalisation des écoulements.
3.2.1
Les régimes de l'Amazone et de ses affluents.
Le
bassin amazonien offre une diversité topo-climatique
régionale non-négligeable, introduisant des
rythmes d'écoulement variés d'amont en aval,
malgré les apports très proches par les affluents
de rive droite et de rive gauche. Les cours d'eaux en provenance
des Andes (bassin d'Acre, Madeira, Jarua, etc.) ont un régime
de crues de janvier, février, mars. Les cours d'eau
en provenance des plateaux du Bouclier brésilien ont
des crues de février à mai-juin, tandis que ceux en
provenance du Bouclier Guyanais ont des crues de mai à
juillet. Dans chacun de ces sous-bassins versants, et tout
particulièrement ceux ayant un amont andin, on note
la progresssion d'une onde de crue de l'amont vers l'aval
entraînant un décalage des crues entre la zone
piémont et l'aval du bassin. Ainsi à l'amont
du Rio Madeira avec un de ses affluents, le Rio Beni, le maximum
de crue est décalé de un à deux mois
par rapport à celui du cours d'eau en aval. Par ailleurs,
le rapport entre les débits maxima et minima dans la
partie amont sous influence andine sont beaucoup plus marqués
qu'à l'aval où le caractère montagneux
disparaît. On note un rapport également élevé
entre les débits maxima et minima dans le cas du Xingu
en relation avec une saison sêche marquée. En
revanche, le rapport est faible pour les affluents en provenance
du Bouclier Guyanais, plus humide.
L'Amazone connaît une période de crue s'étalant
de mai à juillet. Bien que tout au long du parcours
du Solimões/Amazone, les contrastes de débits
maxima et minima est faible, compris entre 2 et 3, les côtes
d'altitude du fleuve entre les hautes et basses eaux peuvent
varier d'une dizaine de mètres (13 mètres à
Manaus).
3.2.2 Régionalisation
L'étude
des débits des cours d'eau et de leur relation avec
les facteurs intervenant sur l'abondance des débits
montre le rôle de la superficie de captation des eaux
du bassin hydrographique (donc la surface des bassins versants)
et des précipitations (distribution et tonalité)
dans le bilan hydrologique du bassin versant.
Ainsi,
un diagramme fondé sur la relation surface du bassin
versant et débits indiquent une forte corrélation
avec deux types de population : les cours d'eau dont
les bassins versants reçoivent plus de 2 500 mm
de précipitations annuelles et ceux recevant moins
de 2 500 mm. Or les précipitations moyennes
annuelles sur l'ensemble du bassin amazonien sont de l'ordre
de 2 460 mm.
Ces
deux facteurs conditionnent une différenciation régionale
des écoulements dans le bassin avec des bilans différents
d'un bassin à l'autre (cf. tableau ci-dessous)
et une variabilité hydrologique saisonnière
en liaison avec le régime des précipitations.
Tableau des débits
spécifiques dans le bassin amazonien
Cours d'eau
|
Débits spécifiques
en litres/sec/km2
|
Rio Negro et affluents
de rive gauche en amont de Manaus
|
50 à 90
|
Affluents de la rive
droite en amont de Manaus (Purus, Jurua)
|
15 à 40
|
Aval du Rio Madeira
et autres affluents de rive droite
|
5 à 25
|
Affluents issus du Bouclier
Guyanais (Rio Branco, Trombetas, Jari,..)
|
15 à 40
|
Solimões / Amazone
|
34 à 50
|
On
distingue quatre
régions hydrologiques ou "zones" :
-
la zone 1 ou régime Équatorial (Rios
Negro, Iça, Japura...) avec un régime peu accentué
et un maximum de mai-juin. Ceci correspond à des régions
où les précipitations sont de l'ordre de 2 800 mm
annuels.
-
la zone 2 est caractérisée par un régime tropical.
cette zone se subdivise en deux unités :
#
le Tropical Austral (bassin versant du Madeira
amont, du Purus, etc.) à un seul maximum aux cours
des du premier semestre, correspondant à des précipitations
abondantes sur ces régions pendant cette période
et un maximum de pluviométrie sur les Andes.
#
le Tropical Boréal (dont le Rio Branco) avec un maximum
bien marqué vers le milieu de l'année. ceci
correspond à des précipitations maximales sur
les hauts plateaux guyanais.
-
la zone 3 ou Tropical Austral à saisons contrastées
correspond aux plateaux du Bouclier Brésilien, avec
les Rios Tocantins, Xingu, Tapajos et Madeira aval. Ces régions
peu élevées sont marquées par des précipitations
de décembre à mars, avec des hautes eaux en
début d'année calendaire.
-
la zone 4 se caractérise par un régime équatorial
altéré (Rios Solimões et Amazone) qui
résulte de la combinaison des précédents
avec un assez faible décalage entre les deux rives
car les régimes austraux sont retardés et ceux
du nord sont avancés !
la
suite de l'article....
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