2. LE SYSTÈME CLIMATIQUE
AMAZONIEN
2.1 Un climat chaud et
humide
2.1.1 L'importance des
précipitations.
L'ensemble
du bassin amazonien se situe dans la zone chaude, essentiellement
dans le domaine Équatorial, marqué par des températures,
des précipitations et une humidité élevées
("touffeur équatoriale" selon M. Droulers).
Il s'agit du plus vaste domaine continental chaud et humide
du globe avec le plus souvent plus de 2 mètres
d'eau par an en moyenne par an, souvent plus de 2,5 mètres
mais avec des records à plus de 3 mètres au Brésil
et plus du 6 mètres sur le versants orientaux des Andes....
Le maximum des pluies, à l'ouest du Bassin Amazonien,
est lié à la configuration des Andes.
Brutalité
et intensité des averses de début d'après-midi
(cycle diurne) : quelques minutes à quelques heures,
image du "mur d'eau de pluie". Les averses et orages
sont produits par des nuages convectifs, issus de systèmes
de type lignes de grains (1 500-2 000 km x 170 km).
Les conditions pour la convection débutent en fin de
matinée :
-
stratification thermique instable
-
degré d'humidité suffisant pour permettre la
condensation lors de l'ascendance
-
convergence des basses couches
La
convergence peut résulter des fronts ou de la ZCIT
( Zone de Convergence InterTropicale). Les courants subsidents
froids peuvent agir comme des fronts et forcer l'air chaud
et humide à s'élever.
À
l'Est, les situations de brise favorisent l'abondance des
précipitations (due à la convergence nocturne des alizés
et de la brise de terre) : elles sont responsables de 45%
de la pluviométrie : 27% des formations nuageuses associées
vont au delà de 400 km des côtes et certaines
peuvent atteindre les Andes en 48 heures.
2.1.2
Les régimes saisonniers
Sur
le document de synthèse établi par Roucou (1997),
on note une partition de la région en sept ensembles
de même caractéristiques de variabilité
des précipitations.
Régime tropical à saison des pluies d'été
: de mai à octobre pour le Vénézuela,
de décembre à mai pour le Nordeste, l'Amazonie
du sud et de l'est.
Régime
de type Équatorial à deux maximums (mars
à juin et octobre-janvier) pour la Guyane, l'Amazonie
du nord et la Colombie.
2.1.3
Chaleurs et friagems
Attention
aux moyennes : températures le plus souvent comprises
autour de 26°C par mois, mais rythme diurne de 30-32°C au
maximum (avant la pluie de l'après-midi) et 18-20°C
la nuit, ce qui peut paraître "frais", surtout
du fait de la brutalité des passages jour-nuit. Il
faut retenir que le rythme diurne et son amplitude sont supérieurs
aux rythmes saisonniers.
Les
fronts froids pénètrent loin vers l'Équateur
: vers 10°S minima 6°C : il n'y a qu'à cet endroit
que le monde équatorial connaît des températures
aussi fraîches à si basse altitude. Les masses
d'air polaire d'origine maritime ne sont pas stoppées
par les reliefs. Des trajectoires moyennes se localisent dans
les couloirs entre les Andes et le plateau brésilien
: elles sont à l'origine des friagems, vents
froids entre mai et juillet qui peuvent faire chuter la température
de 15°C en quelques heures. Les fronts peuvent rester stationnaires
et participer à l'activité convective du sud
de l'Amazonie, voire conduire à des inondations sur
les affluents de rive droite de l'Amazone.
2.2
Les mécanismes climatiques aux échelles globales
et régionales
"
La disposition spatiale des climats régionaux est fonction
à la fois du forçage radiatif et des réponses
géographiques différentielles... Sous les tropiques,
les gradients thermiques horizontaux sont plus faibles qu'ailleurs,
en raison de la faible amplitude annuelle du forçage solaire.
L'atmosphère tropicale est alors plus sensible aux
conditions de surface (relief, albédo, température,
humidité, végétation".
( P. Roucou, 1997)
2.2.1 Originalité
du dispositif américain
Les
bassins forestiers du Congo et de l'Amazonie ont un bilan
énergétique net annuel compris entre 40 et 60
watt.m-2 (contre 80 pour l'Asie du sud est, "continent
maritime", car l'albédo y est plus faible et les
émissions infrarouge (IR) y sont moindres) = régions
sources.
Cette faible capacité de stockage sur les continents
entraîne une restitution rapide de l'énergie
à l'atmosphère sous forme d'une intense activité
convective (cumulo-nimbus) : ZCIT plus intense sur les continents
tropicaux.
L'énergie est redistribuée sous forme de cellules
méridiennes (Halley) et zonales (Walker) afin de rétablir
les équilibres entre latitudes et entre façades est
et ouest des océans.
Circulation
méridienne : en janvier, février et mars,
l'Amérique du sud tropicale est sous la domination
des alizés de nord-est qui pénètrent
loin à l'intérieur du continent. En juillet,
août et septembre, le flux de sud-est sur le Nordeste
est lié à la remontée de l'anticyclone
de l'Atlantique sud. La ZCIT favorise les mécanismes
pluviogènes surtout le long de la côte Atlantique.
La ZCIT atteint sa position la plus australe en mars.
Circulation
zonale : Ascendance continentale sur Amazonie (convection)
et convergence de basses couches des flux en provenance de
l'Atlantique. Divergence en altitude et subsidence sur l'Atlantique
et le Nordeste.
Les hautes pressions d'altitude sont associées à
l'anticyclone bolivien qui se développe sur l'altiplano
andin (5 000 mètres) : il constitue une source
de chaleur pour la moyenne troposphère. Son intensité
est liée à la distribution des pluies : il se
déplace vers le nord et s'affaiblit durant l'été
boréal pendant que le sud de l'Amazonie connaît
sa saison sêche. En revanche, le nord-ouest de l'Amazone,
toujours sous l'influence de l'anticyclone d'altitude, ne
connaît pas de réelle saison sêche. L'anticyclone
se décale vers le sud à partir de septembre.
L'Amérique
du sud ne présente pas la même dissymétrie
N-S (océan continent) que l'Afrique et l'Asie.
Pendant l'été austral, le flux trans-équatorial
de nord-est faible ne pénètre que de quelques
degrés dans l'hémisphère sud, ne provoquant
pas de déviation de l'alizé. Les eaux les plus
chaudes se situent sur les bouches de l'Amazone et les côtes
guinéennes, la ZCIT reste donc près de l'Équateur
sur l'Atlantique.
Pendant l'été boréal, les eaux les plus
chaudes se situent sur l'Est Pacifique et le Golfe du Mexique,
donc on note un maximum de ZCIT. Cette dernière reste
donc toujours dans l'hémisphère nord.
2.2.2
Rôle du relief
Le
dispositif topographique est celui d'une vaste cuvette ouverte
sur l'Atlantique avec les reliefs modestes des Guyanes (1 280
m au Surinam, 2 810 au Roraima), du plateau brésilien
(rarement plus de 800 m). Elle est séparée du
Pacifique par la Cordillères des Andes, élevé
et continue (cf. paragraphe 1).
En
conséquence, les flux d'origine atlantique pénètrent
sur le continent Amazonien, contrairement aux flux du Pacifique.
Le tracé concave de la Cordillères des Andes,
à l'Ouest, favorise la convergence des basses couches.
2.2.3
L'importance des interactions végétation-atmosphère
Rappel
: la forêt amazonienne consomme autant d'oxygène
qu'elle n'en produit, ce n'est donc pas le "poumon vert"
de la planète que l'on a longtemps cru. Reste que le
rôle de la végétation est complexe.
Théorie
de Charney (1977) où la diminution de la végétation
entraîne la modification de l'albédo et donc
du bilan energétique et des précipitations.
Courel (1984) a montré que pour le Sahel, la diminution
du couvert végétal sur le long terme n'entraînait
pas systématiquement une augmentation de l'albédo...
Rôle
essentiel joué par les forêts tropicales sur
le système climatique : "80 à 90% de l'énergie
radiative disponible sont utilisés pour l'évapotranspiration.
Il reste entre 10 et 20% pour réchauffer l'air ambiant
(Molion, 1987)" ; rôle d'interception de la
canopée. Transfert de chaleur latente très
supérieur au flux de chaleur sensible.
En
Amazonie, le flux d'évapotranspiration correspond,
en moyenne, à 50% de la pluviométrie (Molion).
"L'eau précipitable contenue dans la colonne
atmosphérique de la station de Tabatinga, pourtant
à 2 500 km de l'Atlantique, est ainsi supérieure
à celle de la station de Belem, près de la côte.
Une partie de l'humidité de l'atmosphère provient
alors de la vapeur d'eau recyclée par la forêt."
Simulations sur le remplacement de l'Amazonie par des pâturages
(Dickinson, Henderson-Sellers, Nobre) avec albédo passant
de 12,5 à 21,6% : il en résulte une augmentation de
la température au sol, une baisse de l'évapotranspiration
et d'une diminution des précipitations de l'ordre de
20 à 30%....
Les
travaux de Richey (1989) n'ont pas montré de baisse
significative du débit de l'Amazone en relations avec
les surfaces défrichées (sans doute encore trop
réduite en pourcentage)...
la
suite de l'article...
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