1. L'ORGANISATION DU BASSIN
VERSANT AMAZONIEN.
1.2
L'édification du bassin amazonien.
Le
bassin amazonien témoigne d'une longue évolution qui
remonte au pré-Cambrien, période à laquelle
se forme le bouclier sud-américain.
1.2.1 Le Paléozoïque inférieur.
Trois
grands bassins intracratoniques s'individualisent, dont le
bassin amazonien. De l'Ordovicien au Carbonifère inférieur,
le bassin constitue une dépression large d'environ
400 km, ouverte vers l'Ouest à proximité de
l'Océan Pacifique, allongée selon un axe
Ouest-Est (identique à celui utilisé par le
cours d'eau actuel) et dans lequel s'effectue une sédimentation
à dominante détritique, alternativement marine
et continentale. Elle est essentiellement fine (argiles, limons
et sables). Dans ces sédiments, dont l'épaisseur
peut atteindre plusieurs centaines de mètres, s'intercalent
quelques passées grossières (cailloutis d'origine
morainique - dans les dépôts les plus anciens - et fluviale),
des calcaires et évaporites. Ce n'est qu'à partir
du Silurien qu'ils sont fossilifères. Ces sédiments
affleurent actuellement sur les bordures Nord et Sud de l'axe
moyen et inférieur du fleuve Amazone. Cette sédimentation
ne dépasse guère la région d'Iquitos
en direction de l'Ouest et la confluence du Xingu et de l'Amazone
à l'Est.
Durant
cette période marquée par un climat froid à
tempéré, se produisent des mouvements tectoniques
du socle sous-jacent, découpant le bassin et expliquant
les variations du niveau marin et des faciès sédimentaires.
1.2.2
Le Paléozoïque supérieur (Carbonifère
moyen et supérieur, Permien).
Durant
cette période, les faciès sédimentaires
sont essentiellement marins. L'extension des dépôts
sédimentaires de cette période déborde
légèrement à l'Ouest et à l'Est
les limites de ceux de la période précédente.
Les affleurements sont localisés en bande étroite
le long de la dépression centrale, en aval de Manaus.
Cette série sédimentaire, dominée par
les dépôts calcaires, dolomitiques et évaporitiques,
commence et se termine par une série détritique
fine (sables et limons). Comme précédemment,
durant cette période, des déformations tectoniques
affectent le socle sous-jacent (notamment apparition de l'Arc
de Furus) et, en combinaison avec un climat chaud et sec,
conditionnent les faciès sédimentaires. À
la fin du Paléozoïque est totalement émergé
et l'Arc d'Iquitos sépare définitivement, jusque
la surrection des Andes, le bassin d'Acre du reste du bassin
amazonien qui n'est plus sous influence du Pacifique.
Les
axes de ces déformations correspondent aux grandes
directions des structures précambriennes qui ont rejoué
pendant toute cette période.
1.2.3
Le Mésozoïque (230 à 65 millions d'années).
L'ensemble
du Bassin Amazonien est essentiellement affecté par
une ambiance continentale. Le passage du Permien au Trias
est marqué par des manifestations volcaniques basiques.
Au Jurassique, seul le sous-bassin de Acre, dans la
partie amont, connaît une sédimentation à
caractère sableux se terminant par un dépôt
salin, l'ensemble épais de 950 mètres dans sa
partie la plus développée. Par ailleurs, au Jurassique,
apparaissent les bassins côtiers en relation avec les
premières manifestations de l'ouverture de l'Atlantique
dans l'hémisphère sud, se traduisant par une
sédimentation à l'emplacement des régions
littorales actuelles. Ainsi l'aval du Bassin Amazonien participe
à ce phénomène avec une sédimentation
dans la fosse de Marajo.
Jusqu'au
Crétacé inférieur inclus, c'est l'érosion
qui domine dans le reste du bassin avec des manifestations
magmatiques nombreuses tandis que les autres bassins intracratoniques
connaissent une sédimentation plus ou moins continue.
La paléogéographie de cette période est
celle d'un bassin exondé dans sa partie médiane
et immergé à l'Est (l'Atlantique en expansion)
et à l'Ouest (connexion existant encore avec le Pacifique).
Au
Crétacé moyen, après une régression
régionale importante, une transgression de grande ampleur
se manifeste affectant tous les bassins, y compris le Bassin
Amazonien. Dans ce dernier, la formation témoin de
cette période est "formation d'Alter do Chao"
; constituée de sédiments détritiques
de teinte rouge (argiles, limons, sables et conglomérats).
Ces dépôts se situent dans la partie moyenne
et aval du bassin. À la même période,
à la limite sud du bassin (Chapada dos Parecis), il
y a mise en place d'une discordance sur le bouclier d'une
formation sableuse à matrice argileuse, dont la régularité
peut être interrompue par des lits plus limoneux ou
des conglomérats. Cette formation est strictement limitée
au Sud du parallèle 11°30. Elle se prolonge jusqu'au
Rondônia.
Vers
la fin du Crétacé supérieur, une régression
généralisée se produit, suivie d'une
nouvelle transgression très limitée où
seul, dans le Bassin Amazonien, le Bassin d'Acre et la fosse
de Marajo sont occupés par la mer avec accumulation
de sédiments épais.
1.2.4
Le Cénozoïque.
La
formation des Andes, qui commence à se développer
au Crétacé, se poursuit jusqu'au Miocène
terminal, influant sur la configuration du Bassin Amazonien.
À la fin du Crétacé s'accentue une tendance
généralisée du socle à l'émersion,
tendance qui s'affirme au début du Cénozoïque
jusque l'Oligocène. Le début du Cénozoïque
est marqué par une tendance à un mouvement positif
du socle et à une organisation du réseau hydrographique
qui annonce celle actuelle. Les dépôts sont à
caractère continental dans l'ensemble des bassins localisés
sur le continent sud américain.
a.
.Au Cénozoïque inférieur.
Le
Bassin d'Acre et le Bassin Amazonien moyen et inférieur
connaissent une épaisse sédimentation à
caractère détritique fin dominant, en milieu
fluvio-lacustre, en ambiance chaude, et par périodes
sêches (présence de dépôts salins).
L'Ouest du bassin d'Acre est affecté par des plissements
de direction méridienne, témoignant de l'activité
de la Chaîne Andine. À l'Est du bassin, les formations
détritiques de Marajo passent latéralement à
des faciès marins. C'est de cette période (notamment
à partir de l'Oligocène) que datent l'individualisation
du Bassin Amazonien et sa connexion définitive avec
l'Atlantique.
Au
Miocène, seule la partie aval du bassin (secteur
Marajo) est affectée par une sédimentation à
caractère marin, dominée par les calcaires et
les argiles. Durant cette période, la partie amont
du bassin de l'Amazonie est affectée par des mouvements
tectoniques tandis que tout le reste du bassin (à l'exception
de l'extrémité aval) est émergé et fonctionne
largement sous l'action les processus continentaux.
Au
Pliocène, dans le Bassin Amazonien, se met en place
une formation sédimentaire dénommée "Formation
Pebas" ou "Formation Solimões". Cette
formation est constituée d'argiles à passées
sableuses, parfois à des concrétions carbonatées
ou à des dépôts salins et à des
bancs de lignite d'une épaisseur de 2 à 10 mètres,
notamment dans la partie supérieure du sédiment.
Cette formation occupe tout le Bassin Amazonien et atteint
à l'Ouest (bassin d'Acre) une épaisseur supérieure
à 1 000 mètres. Au centre du bassin, cette
formation repose en discordance sur la formation Alter do
Chao (Crétacé Moyen). À l'aval (secteur
de Marajo), se déposent essentiellement des sables
et des intercalations d'argiles, dans des conditions de sédimentations
proches de l'actuel, à la fois sous influence marine
et fluviale, avec un mouvement subsident très fort.
Le
Bassin de l'Amazonie, à cette époque, acquiert
son organisation définitive et s'ouvre définitivement
sur l'Atlantique. Cette période se caractérise
par un climat chaud et humide, une organisation du bassin
en grandes plaînes d'inondation, la présence
de nombreux lacs, dont un certain nombre non-conecté
avec les axes fluviaux. L'axe Ouest-Est du bassin acquiert
une tendance subsidente expliquant l'épaisseur des
sédiments. L'ampleur de la formation Solimões
dans l'Ouest du bassin s'explique par l'activité de
surrection des la Chaîne andine qui fournit son piémont
en dépôts corrélatifs à caractère
détritique (phase Quechua du cycle andin). Par ailleurs,
dans cette région du piémont andin, cette période
a été marquée par des déformations
tectoniques synsédimentaires. Plus en aval, (bassin
traversé par le Solimões), un rejeu de fractures
anciennes (directions NO-SE et NE-SO) se produit durant cette
période
b.
Le Quaternaire
Cette
période connaît, sur deux millions d'années,
une évolution contrôlée par les changements
climatiques qui se sont produits pendant cette période.
La distribution des formations et modelés quaternaire
est la suivante:
-
sur les boucliers, on note la présence de dépôts,
isolés par rapport aux grands axes fluviaux, généralement
d'épaisseur modeste, développés sur de
grandes surfaces (plus de 30 000 km2, qu'il
s'agisse des Boucliers Guyanais ou Brésilien), et constitué
de sables, argiles et débits grossiers. Partout ailleurs
un modelé multi-convexe occupe l'espace.
-
de part et d'autre des axes fluviaux, les terrains quaternaires
s'organisent selon le schéma de la figure citée
ci-dessus, où l'on peut distinguer, de la bordure vers
l'axe fluvial, les Terras Firmes, les Tesos
et la plaine d'inondation (Varzeas et Igapos).
#
Les Terras Firmes se subdivisent en deux unités sédimentaires.
La
plus ancienne (unité A) se situe à une vingtaine de
mètres au-dessus du niveau moyen du fleuve. Ce sont
des alluvions caillouteuses, dans lesquels s'intercalent des
dépôts issus de mouvements de terrain en provenance
des versants voisins. Elles reposent en discordance sur la
formation Solimões ou la formation Alter do Chao. C'est
dans le bas Madeira qu'elles sont les mieux représentées.
Une formation plus jeune (unité B), localisée
à 10-15 mètres d'altitude, est constituée d'argiles
(à dominante kaolinique) plus ou moins sableuse, elle
est massive, sans stratification. Entre 0,5 et 2 mètres
de profondeur, se développent des concentrations ferrugineuses
plus ou moins continues (cangas). Cette formation repose
en discordance sur la formation Solimões.
Ces
deux unités ont été incisées par
le réseau hydrographique et partiellement érodées,
de telle sorte qu'en surface, on peut observer des fragments
de cangas, formant un pavage sur la superficie de dégradation.
En certains points, les dépôts de l'unité
B sont recoupés en surface par des dépôts
colluviaux remaniant les débris de Canga. Ceci traduit
une phase morphogénique active postérieure à la mise en place
des matériaux.
#
Les Tesos sont des terrasses, normalement à l'abri
des inondations, situées à une dizaine de mètres
au-dessus des eaux moyennes du fleuve. Elles sont relativement
récentes et constituées d'argiles et de
sables. Elles sont fréquemment indurées par un ciment
ferrugineux. Dénudées, elles portent ainsi le
nom de Pedra-do-Para.
#
Les Vazeas et Igapos correspondent au niveau le plus
récent du fleuve. Ils seront examinés
plus en détail dans le paragraphe 4.
La
mise en place de cet ensemble s'explique par les fluctuations
climatiques et eustatiques mondiales. Si le Pléiostocène
est relativement méconnu, on sait que lors du dernier
maximum glaciaire (18 000 ans BP), la température
de l'Atlantique était inférieure de 2 à 3°C par rapport
aux températures actuelles, le climat plus sec. La
forêt ombrophile avait laissé place à
des formations végétales à caractère
xérophytiques. Du fait de l'immobilisation de l'humidité
de la planète sous forme de glace aux hautes latitudes,
le niveau local de l'Océan Atlantique se situait aux
environs de - 110 mètres. Il en ait résulté
une incision généralisée des cours d'eau.
Ainsi l'incision s'est propagée sur plus de 3 000
km le long de l'axe principal, provoquant une phase d'érosion
majeure. Ce n'est qu'à l'Holocène que le niveau marin
remonte, entraînant le comblement des vallées
alluviales par des sédiments fluviatiles et tout particulièrement
au cours des derniers 2 000 ans.
la
suite de l'article...
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