1. L'ORGANISATION DU BASSIN VERSANT AMAZONIEN.

 

1.1 Une vaste dépression et des limites de bassin versant contrastées.

Le bassin amazonien, dans son ensemble, constitue une grande cuvette d'extension Ouest-Est d'environ 300 km et de quelques 2 000 km du Nord au Sud, dans laquelle s'écoulent les grands cours d'eau qui tous, convergent vers une gouttière centrale de direction Ouest-Est.
Ce bassin est marqué par des contrastes topographiques accentués, avec d'une part la chaîne andine au relief "vigoureux" (plus de 6 000 mètres), les serras du Nord (sources du Rio Branco, sous-affluent de l'Amazone), avec localement des altitudes maximales de 2 500 à 3 000 mètres, des plateaux d'altitudes modérées au Sud ( 800 -1 000 mètres) s'inclinant doucement vers la gouttière centrale et de vastes plaines. Environ 40% du bassin se situe à des altitudes inférieures à 200 mètres.
Il est constitué de trois grandes unités morphostructurales : le socle cristallin des Boucliers Brésiliens et Guyanais localisé au Nord et au Sud du bassin , une vaste unité sédimentaire en forme d'éventail formant une bande  d'environ 350 km de large à l'Est, et s'ouvrant largement à l'amont sur une distance de plus de 2 000 km ; enfin à l'Ouest, la Chaîne Andine borde ce bassin sédimentaire et constitue une bande étroite de quelques 100 à 200 km de large.

1.1.1 Des bassins versants bien individualisés dans la Chaîne Andine et sur les boucliers

Le bassin versant amazonien est bordé à l'Ouest par la Chaîne Andine, orogène de type alpin et de formation récente, dont les altitudes maximales dépassent plus de 5 500 mètres (le Cayembé 5 790 m et le Cotopaxi 5 897 m en Équateur), voire 6 000 mètres (la Cordillera Real en Bolivie avec le Nevado Illampu 6 330 m ou le Nevado Ancohuma 6 428 m).
La retombée amazonienne du versant andin est brutale : selon les régions, on passe d'altitudes de 3 500 / 4 000 mètres à un piémont  situé aux environs de 500 m d'altitudes, sur une distance d'une centaine de kilomètres. Ceci se traduit par des versants dont les valeurs moyennes de pente dépassent fréquemment les 30-35° et un réseau hydrographique très dense, fortement encaissé, au profil longitudinal heurté et à caractère torrentiel.
Cette unité n'occupe qu'environ 10% de la surface du bassin mais joue un rôle essentiel dans le fonctionnement hydrogéomorphologique de ce dernier, même si son influence s'atténue progressivement vers l'aval.

Au Nord, sur le Bouclier Guyanais, des plateaux à caractère étagé, parfois fortement incisés (Serra) ont des altitudes comprises entre 1 000 et 3 000 mètres. Ce bouclier se divise en deux unités :
- l'une à l'Ouest, à la limite entre le sous bassin du Rio Branco et l'Orénoque avec des altitudes supérieures  à 1 500 mètres et plus localement de 2 800 à 3 000 mètres. Ces plateaux constituent des serras étroites aux valeurs de pente marquées du fait de la proximité du niveau de base local constitué par les Rios Branco et Negro.
- l'autre à l'Est, servant de ligne de partage des eaux entre les petits affluents de la partie aval de l'Amazone et les fleuves côtiers des Guyanes et du Surinam. Les altitudes  maximales se situent  entre 500 et 1 000 mètres. De longs plans inclinés les raccordent  au niveau de base local.
Au Sud, sur le Bouclier Brésilien, dominent des plateaux peu élevés, dont les altitudes maximales varient entre 800 et 1 200 mètres (Chapada dos Parecis, Planalto do Mato Grosso, Chapada do Roncador, do Cachimbo, etc.) et séparent le bassin amazonien des bassins du Paraguay, de l'Araguaia et du Parana. ces topographies s'inclinent  régulièrement vers la gouttière centrale par l'intermédiaire de longs plan situés entre 200 et 500 mètres d'altitude.
Ces deux boucliers occupent environ 40% de la surface du bassin.

1.1.2  Les topographies et limites du bassin sédimentaire

Sauf exception, les topograhies ont des altitudes inférieures à 500 mètres et seules 25 à 30% d'entre-elles sont comprises entre 200 et 500 mètres. Ce sont de vastes plaines alluviales, au relief peu marqué. Si l'organisation dans la partie moyenne et aval est claire, avec un système de pente convergent vers l'axe central, la partie amont n'est pas sans présenter un certain caractère confus :
- sur le piémont andin, les directions de vallée ne sont pas sans poser de problèmes, notamment avec les changements de direction dans le tracé des cours d'eaux, des divergences dans les directions.
- les limites de bassin versant avec l'Orénoque au Nord/Nord-Ouest et les affluents du Paraguay du Sud/Sud-Est : le tracé de ces deux limites de bassin versant témoignent de limites mal définies. La ligne de partage des eaux entre le bassin de l'Orénoque et celui du Rio Négro, affluent de l'Amazone, se situe généralement  à moins de 200 mètres d'altitude, avec un tracé de détail très sinueux entre les têtes de bassins versants élémentaires, des difluences.
- la limite avec le bassin du Paraguay a des caractères similaires. La différence porte sur les altitudes  (légèrement supérieures à 200 mètres) et sur la présence d'un grand nombre de lacs et de zones marécageuses, ces dernières témoignant de conditions d'écoulement difficiles.

1.1.3  Un réseau hydrographique dense.

Cette cuvette est parcourue par une multitude de cours d'eau (on en dénombre 1 100, dont 17 plus grands que le Rhin (1 600 km)) dont les caractéristiques hydrogéomorphologiques dépendent largement de la localisation de leur source.
L'Amazone est issue de la confluence de nombreux cours d'eaux et ne porte ce nom qu'à partir de Manaus. La longueur maximale du cours d'eau, depuis les Andes jusqu'à l'Atlantique, varie selon que l'on considère le Marañon ou l'Ucayali comme cours amont du fleuve.
Si l'on considère le Marañon comme partie amont de l'Amazone, le fleuve a une longueur de 6 400 km. Sa source se situe à 5 050 mètres d'altitude, sur le flanc Est de la Cordillera Huayhuash, au Pérou, à seulement 200 km du Pacifique.
Si l'on considère le Rio Ucayali comme source de l'Amazone, la longueur du fleuve est de 6 900 km. Il prend sa source au mont Huagra à 5 420 mètres d'altitude, au Nord-Ouest de Cuzco.
À la confluence du Marañon et du Rio Ucayali, le fleuve prend le nom d'Amazonas pour prendre ensuite celui de Solimões peu après la confluence avec le Rio Napo (affluent de la rive gauche en provenance des Andes équatoriennes). Ce n'est qu'après sa confluence avec le Rio Negros à Manaus qu'il porte le nom d'Amazone.

Figure 1 : Confluence du Rio Negro et du Rio Solimões à Manaus (État de l'Amazonas)

Trois zones de convergence marquent le bassin amont et moyen de l'Amazone :
- l'amont d'Iquitos, au Pérou, marqué par les confluences des Rios Marañon et Ucayali,
- le bassin Amazonas / Solimões avec les Rios Napo, Iça et Jurupa (rive gauche), Itai, Jurua et Purus (rive droite) pour les principaux,
- le bassin de Manaus avec la confluence du Solimões avec les Rios Madeira et Tapajos (rive droite) et le Rio Negro (rive gauche).

La plaine alluviale centrale se caractérise par ses faibles altitudes et sa platitude : ainsi, l'Amazonas se situe à 65 mètres d'altitude à 3 000 km de l'embouchure, l'Amazone à Manaus est à 25 mètres d'altitude à 2 000 km de l'embouchure. En ce dernier point, le fond du lit est déjà sous le niveau de la mer. La largeur moyenne du chenal de l'axe hydrographique principal est de 12-13 km (plus exceptionnellement de 2-3 km à Obidos). Il est bordé par une plaîne alluviale inondable ou lit majeur, formant un vaste marécage (Varzea) dont l'extension toujours importante est très variable : ainsi elle varie de quelques dizaines à quelques centaines de kilomètres (200 à Manaus et seulement 50 à Obidos).
Au total, un vaste bassin dont l'organisation s'explique par son évolution morphostructurale.

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